dimanche 24 avril 2011

POURQUOI "SMORGASBLOG" ?




Les plus curieux d'entre vous se demanderont peut-être (à l'instar de Valentine Deluxe qui me posait la question sur Facebook) ce que signifie "Smorgasblog". Il n'est jamais aisé de baptiser un blog. MEIN CAMP me fut soufflé par Valentine ; THE BI-QUEEN WAY (aujourd'hui défunt, malgré les timides tentatives de résurrection par ma nièce Nini SOCQUETTES) se voulait un clin d'œil au film Queen Bee, l'un des joyaux de la filmographie de Joan CRAWFORD, tout en jouant sur l'idée d'une queen bisexuelle ; DÉSUET... se passe de commentaires (et se passera tout aussi bien de mises à jour, puisque les "hadopisations" que j'y proposais seront désormais centralisées ici) ; FEARS FOR QUEERS coule suffisamment de source pour que je fasse l'économie d'une explication...
SMORGASBLOG est quant à lui un dérivé du terme scandinave "Smorgasbord", qui désigne un assortiment de hors-d'œuvres très populaire en terre Viking. Une façon de signaler que ce blog offrira une macédoine d'articles n'ayant pas forcément de ligne directrice, et répondant surtout à l'humeur du moment. J'ai découvert ce vocable au début des années 80 grâce à l'une de mes idoles absolues, Jerry LEWIS, qui en fit le titre original de son film T'es fou, Jerry ! (rebaptisé Cracking Up quelques années plus tard.)



Et puisque je me sens d'humeur partageuse, permettez-moi de vous offrir en avant-première quelques paragraphes consacrés au film dans mon étude sur le cinéma camp, actuellement en cours de rédaction. Ces lignes forment la conclusion d'un chapitre dédié à l'expression d'une sensibilité camp dans l'œuvre lewisien (pour une définition du mot camp, vous êtes priés d'aller voir ailleurs -- pourquoi pas ici ?...)


Un smorgasbord scandinave typique

SMORGASBORD (T'ES FOU, JERRY ! Jerry LEWIS, 1983)

T'es fou Jerry ! retrouve les qualités plastiques et l'humeur décapante des meilleurs Lewis, mises au service d'une fable saumâtre sur l'incapacité d'insertion d'un anachronisme ambulant (le "personnage Jerry") dans la modernité - et, partant, sur l'obsolescence d'un style comique (le slapstick déconstructif lewisien) dans un monde gouverné par "l'absurde ordinaire". Âgé de 57 ans, le cinéaste-comédien semble ici admettre son incapacité à adopter l'image plus mature à laquelle ils aspirait, et fait revivre une ultime fois (le film sera sa dernière réalisation) l'éternel pré-ado chroniquement déphasé et perclus de complexes. Pour autant, il ne dissimule pas le malaise qu'il éprouve à se conforter dans cette image régressive : pour preuve, le film s'ouvre sur les infructueuses tentatives de suicide de son héros, Warren Nefron, qui ne se tolère plus lui-même. Il décide de consulter un psychiatre, lequel diagnostique "une péricomplication du moi qui se dresse contre certains chromosomes de réaction narcissique." Le film est de nouveau composé de saynettes nous faisant assister aux infortunes quotidiennes de Warren.


Les désirs ambigus de Mister Lewis

Si la problématique du vieillissement du "personnage Jerry" n'est jamais soulevée, c'est qu'elle s'impose d'elle-même au public à travers le spectacle de ce presque sexagénaire au comportement enfantin. Lorsque Lewis, en culottes courtes, effectue un numéro de gosse maladroit avec son complice Bill RICHMOND, l'effet n'est plus le même que vingt ou trente ans plus tôt : le Lewis actuel a clairement dépassé la limite d'âge pour ce genre d'exercice. Sa virtuosité demeure intacte, mais la silhouette a changé, la spontanéité se perd, et avec elle l'illusion de l'enfance que conservait le trentenaire.

"Cachez ce sein que je saurais voir..."

C'est par ce hiatus que le Camp s'introduit dans T'es fou Jerry ! : il y a désormais en Lewis quelque chose de Baby Jane. On ne saurait douter que le cinéaste en était conscient ; la scène finale nous révèle cruellement combien il se savait dépassé par son temps. Sortant d'un cinéma où il vient de voir T'es fou, Jerry !, Warren en raconte les gags aux futurs spectateurs formant la file d'attente, mais il ne réussit qu'à les faire fuir, affligés par ce qu'ils entendent. Pour les remotiver, il change de couplet et invente des péripéties salaces et sanglantes, mieux adaptées aux goûts du public actuel, qui afflue alors en masse. Très clairement, Lewis ne se faisait plus d'illusions sur son potentiel commercial, ni sur son statut au sein de l'industrie hollywoodienne. Il n'ignorait pas davantage qu'il était incapable de répudier de ses films son personnage de gamin prolongé - au risque de devenir, de plus en plus, une Baby Jane au masculin. Ce travesti-là ne lui souriait guère. Il préféra ôter le maquillage -- et raccrocher la caméra.



1 commentaire:

  1. Bonjour, grand fan de Jerry le cinoque aussi (et de Vincent Price vu pour une dédicace dans les 70's à un Festival Fantastique de Paris au Grand Rex), moi c'est depuis les années 60 et le culte Nutty Professor ! Hélas je suis passé trop tard le lien MU est mort. Merci pour tes blogs plein d'infos BBjane.
    Gabuzomeuzomeu

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