jeudi 16 juin 2011

LE SERGENT (The Sergeant, John FLYNN, 1968)





A la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, le sergent Rod STEIGER est affecté au commandement d'une garnison américaine qui se languit en France, dans le débraillé et l'ennui le plus total. Très à cheval sur la discipline et volontiers tyrannique, il entreprend de faire redresser la barre à ses troupes. Mais c'est la sienne, de barre, qui ne tarde pas à s'élever lorsqu'il rencontre le Première Classe John Phillip LAW, dont la beauté et l'intelligence le plongent dans un émoi fort dommageable à sa réputation et à sa mission. Autre problème, l'élu de son cœur flirte avec Ludmilla MIKAEL, une brave fille qui réside dans le village voisin. STEIGER tente maladroitement de gagner l'amitié du soldat, et plus si affinités. Celles-ci ne se dessinant point, il sème la discorde dans le couple et fait de l'objet de sa flamme sa bête noire, pour le punir de sa tiédeur.




Le Sergent fut l'un des premiers films à traiter du sujet de l'homosexualité dans l'armée. De manière intense et douloureuse, John FLYNN brosse le portrait pathétique d'une ganache condamnée à dissimuler sa vraie nature et ses sentiments derrière une façade d'autorité machiste, qui s'effrite lamentablement dès lors que l'amour en infiltre les lézardes.
STEIGER, qui venait de remporter l'Oscar pour le rôle du shérif raciste de Dans la chaleur de la nuit, est absolument prodigieux dans le registre de l'autorité bourrue et de l'émotion trop longtemps contenue pour ne pas engendrer l'implosion. Il offre peut-être là sa prestation la plus habitée, la plus désarmante aussi, rendant quasi palpable la douleur de cet homme impuissant à colmater les fissures de sa carapace, et assistant avec horreur à la désagrégation de ses masques.
Le film fut injustement boudé par le public et la critique, qui conspuèrent ses aspects mélodramatiques (réels, mais parfaitement maîtrisés) ou se détournèrent avec dégoût de cette histoire de pédé galonné. Ce qui aurait logiquement dû assurer à STEIGER un pic de reconnaissance et de popularité, marqua en fait le déclin de sa carrière : durant des années, il fut condamné aux productions hasardeuses ou bancales, et aux seconds rôles dans des films à succès, mais indignes de son talent.





Le réalisateur John FLYNN, dont c'était la première œuvre, dut attendre que cet échec injustifié soit digéré des producteurs pour se refaire un nom avec des films comme Echec à l'organisation, Pacte avec un tueur, et surtout Haute sécurité, lui aussi fortement empreint de préoccupations homophiles (le corps de Stallone y est érotisé d'assez croquignolette façon).




Le Sergent reste inédit en DVD Zone 2 après une sortie très cheap et confidentielle en VHS chez "MPM Production", en 1990. C'est cette copie sombre et ocreuse (comme en attestent les extraits qui suivent), mais quand même très regardable, que je vous propose en hadopisation (VHSRip, V.F.), pour sa rareté et pour la beauté d'un film à réhabiliter d'urgence.

Le repack de QUEST&MOVY (un grand merci à lui !) : 1 - 2

Extrait n°1 :



Extrait n°2 : AVERTISSEMENT ! L'extrait qui suit constitue l'un des apices émotionnels du film. Aussi en déconseillé-je le visionnement à ceux qui souhaitent préserver le plaisir de la découverte...



12 commentaires:

  1. Merci beaucoup pour cette découverte dans la filmo du grand John Flynn!

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  2. OH PUNAISE !!! JE LE CHERCHAIS DEPUIS DES LUSTRES !!


    COMMENT TE DIRE MERCI ? JE T'AIME ! JE NE SAIS PAS QUI TU ES, MAIS JE T'AIME !

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  3. @ cesar08 : You're welcome...
    @ le goon : Très heureuse de te faire plaisir... Sois rassuré, si tu savais qui je suis, tu m'aimerais beaucoup moins... ;-)

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  4. Ha oui c'est vrai que t'es une fille.... bon, ben je t'aime moins alors... mais suffisamment pour te remercier pour LE SERGENT...
    (non je plaisante).

    En tout cas, merci beaucoup !

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  5. J'en avais entendu parler car il y avait JJohn Phillip LAW (Danger Diabolik est mon film de chevet !). Je vais me pencher dessus. Un film qui a l'air très intéressant. Je trouve ça terrible ces cinéastes qui commencent par une grand oeuvre boudée et disparaissent ensuite dans des films indignes !

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  6. @ Mad Will : "Films indignes", tu es un peu dur. ECHEC A L'ORGANISATION est un petit bijou de polar seventies, et HAUTE SECURITE un plaisir coupable... Si tu aimes J.P. LAW, je te suggère d'être au rendez-vous demain, car je vais proposer ici l'un de ses films les plus rares -- et peut-être son meilleur rôle... Amitiés...

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  7. Merci bien, Rod Steiger dans semble t'il un de ses meilleurs rôle, ça me parle de suite, en plus avec le grand Phillip Law c'est du bonheur.

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  8. Un chouette film ! J'ai oublié de te remercier... d'autant plus que je l'ai Enregistré sur le câble, je l'ai découvert hier soir jusqu'à la scène où Steiger s'en va un fusil à la main et là... coupé ! Plus rien ! Programmation trop juste !
    Je suis donc bien content de m'apercevoir ce matin (après avoir tenté de le télécharger ici-même mais les liens sont morts) que je l'avais gardé dans un coin. Je pourrai donc voir, grâce à toi, la fin !
    Sinon je dirais que la limite du film est qu'il ressemble trop à l'adaptation d'une pièce de théâtre, plus parfois que d'un roman.
    Une jolie découverte néanmoins ! Merci en score !

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    1. Ah oui, ce doit être bougrement frustrant d'être bloqué si près du but !...
      En effet, il y a une dimension théâtrale très prononcée dans ce film, qui reste néanmoins une solide étude psychologique. Je veillerai à remettre un lien prochainement vers le repack de Quest&Movy... Merci de ton passage, et bon week-end !

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    2. Après avoir vu la fin donc... (une fois encore, merci !)...

      Etonnant premier film de John Flynn, produit tout aussi étonnamment par Robert Wise et qui souffre principalement d'un défaut : sembler issu d'une pièce de théâtre alors qu'il est scénarisé par l'auteur du roman lui-même. Outre ce léger bémol (encore que), c'est un film trouble, étudiant avec vigueur des rapports faussés dès le départ par l'attirance homosexuelle refoulée de Steiger pour le jeune John Phillip Law. Tout cela évolue avec un sens de la graduation bien vu. (De par la vampirisation du couple par le sergent, on pense à d'autres films de vampirisation, pas forcément à connotation homosexuelle : "La meilleure façon de marcher" de Miller et son étude sur l'ostracisme ou encore "Une étrange affaire" le meilleur film de Pierre Granier-Deferre dans lequel Piccoli, aidé de Kalfon et Balmer, s'immisçait dans la vie de Lanvin et Baye. Il y a un peu de ça dans "Le sergent", sur un mode tout aussi ambigu (moins que le roman paraît-il, le film semble mettre davantage les pieds dans le plat), sauf que le contexte de l'armée fait, si j'ose dire, qu'elle en prend pour son grade, étant ici synonyme de refoulement de personnalité.

      On y croise aussi le vrai Memphis Slim, c'est pas grand chose, mais c'est aussi toute la fin d'une époque, et on se surprend à se dire rétrospectivement que "Haute Sécurité" n'était finalement qu'une redite un brin lourdingue (et dont le message passait mal, à moins que la vengeance d'une ancienne évasion n'était qu'un leurre pour masquer le calque) de celui-ci en version prison (On remplace Steiger par Sutherland et Phillip Law par Stallone, on filme le tout en version caricature et plop, c'est à l'identique mais en moins bien et en portée courte).

      Steiger y est très bon, plus sobre qu'à l'usuel et Phillip Law y trouve sans doute son rôle le plus subtil et le plus difficile à camper.
      Un chouette film ! Difficile toutefois de déceler le côté obscur vigilante de qcqs Flynn à venir. C'en est, de par la grande sensibilité du film et son caractère fouillé, encore plus étonnant.

      A découvrir !

      P.S. : enfin bon, avis à chaud, si j'ai dit des conneries, faut pas hésiter à me les renvoyer ! :)

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  9. Tiens tiens l'extrait numero 2 a censuré le baiser forcé sur la bouche par le sergent??? Dingue, c'est pourtant ce qui fait toute la force de ce passage

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